(Ce billet fait suite à ce billet-ci)
Le Maître de café est Massimo Pietrangeli, Torréfacteur à la tête d’un petit empire familial, à Rome. Il prépare quotidiennement le café du président de la République au palais du Quirinal. Mais un matin de juillet 1954 le président n’a pas eu de café : Massimo a eu une crise cardiaque.
Miraculeusement sauvé par une tasse de café préparée par un de ses fils venus à son chevet, il sent tout de même que sa fin est proche et entreprend un voyage aux origines. Celles du café, de ses sources personnelles aussi, avec toute sa famille et son percolateur.
Si la machine espresso de Massimo est un personnage à part entière, le café, même si le texte de la quatrième de couverture le suggère, ne l’est pas tout à fait selon moi. Je l’ai perçu comme un lien, l’élément qui va relier des enfants à leur père alors qu’ils ne s’étaient jamais sentis aimés auparavant. Vous êtes d’accord ?
« En fait, je voulais donner au café une importance, une véritable présence, mais pas comme on pouvait l’attendre. Écrire un roman sur un thème comme le café présente un risque : en étalant la documentation qu’on a rassemblée, on étouffe l’intrigue sous une avalanche de faits, de dates, de renseignements techniques. Le roman doit garder son énergie propre et les informations doivent ‘colorer’ l’ensemble sans qu’on puisse résumer l’histoire à un traité sur le café. Donc, je ne dirais pas que le café est le personnage principal, c’est la toile de fond, le motif régulier. J’ai essayé de donner des informations originales et inattendues, un regard sur cette boisson, qui ne soit pas commun, en essayant, entre autres, de savoir si le café, sa préparation, sont sexués ou non. C’est présent à une ou deux reprises dans le roman, par exemple dans une scène où un des personnages féminins n’arrive pas à enclencher le porte-filtre et s’interroge sur le fait qu’il y a une manipulation assez virile des machines espresso. Moi-même quand j’ai reçu ma machine, neuve avec des joints tous neufs, j’ai constaté qu’il fallait de la poigne pour l’utiliser. Ces machines sont assimilables à des locomotives d’autrefois ou des voitures de courses des années cinquante. Ce goût du métal brûlant, de quelque chose d’un peu dangereux. »
En effet, la Storta, la machine du Maître, est décrite comme un dispositif tubulaire où la vapeur circule et en lisant j’imaginais bien Massimo sous les traits de Jean Gabin dans la locomotive de La Bête Humaine.
« C’est une question un peu incongrue que j’ai voulu me poser pour réfléchir au-delà du café, de ce que tout le monde en sait. »
C’est, en effet, ce qui ressort du livre : en plus d’apprendre pas mal d’anecdotes et de détails concernant la botanique, la culture et l’histoire du café, on s’interroge sur sa personnalité.
« Par ailleurs, le café est la boisson populaire par excellence. Des tonnages fantastiques en font la deuxième denrée échangée dans le monde, tout le monde en boit mais, en définitive, peu de gens le connaissent. C’est pourquoi j’en ai, dans le roman, une approche esthétique, proche de celle du vin, du modèle des œnologues, qui considère les origines, les pays, voire les producteurs. Qui respecte le produit dans toute sa complexité, contrairement à une deuxième tendance, plus anglo-saxonne, qui est de consommer des cafés avec de la crème, des toppings, du pralin… plus sucré. A travers le livre j’ai essayé de défendre la première approche, c’est-à-dire de montrer en quoi le café mérite qu’on s’y intéresse de près, même si j’apprécie aussi le petit noir du comptoir, et d’éviter que l’on perde de vue toute la richesse de cette boisson. »
Il y a, dans Le Maître de café, un aspect militant pleinement assumé par Olivier Bleys qui aimerait révéler au lecteur, en dehors du plaisir et de l’évasion de la lecture, la complexité de la boisson et susciter l’envie de boire de meilleurs cafés.
Olivier Bleys sera en dédicace le vendredi 15 mars 2013 à 19h. Voir l’affiche ci-dessus
A mon avis, c’est réussi à tous points de vue.
Pour suivre Olivier Bleys, ses blogs Volubilis et Geopedis
Notez aussi une dédicace sur le stand des éditions Albin Michel, au salon du livre de Paris, le dimanche 24 mars de 14h à 15h30