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Archives Mensuelles: juillet 2015

Rencontre avec Emmanuel Buschiazzo

Emmanuel Buschiazzo

Emmanuel Buschiazzo, pas tout à fait les yeux dans les yeux…

Cela faisait longtemps que je n’avais pas relaté mes rencontres avec les baristi. Voilà que j’y remédie car c’est important de parler de ce métier et de ceux qui le font. Ce n’est pas Emmanuel Buschiazzo qui me contredira. Barista indépendant, il est le créateur et président du Réseau des Baristas de France (RBF). Il est aussi présent sur les réseaux sociaux sous l’identité du Dr Barista. J’ai donc décidé de lui poser quelques questions.

Nous nous sommes retrouvés au Strada Café de la rue Monge à Paris. Là, il commande un café filtré au V60, un kenyan. Moi un éthiopien. Bien installés, je lui demande alors quand et comment lui est venu ce goût pour le café. « Je n’appréciais pas particulièrement le café auparavant, c’était une commodité. C’est la vie d’étudiant qui m’a fait franchir le pas. » Effectivement, quand on est étudiant on boit beaucoup de café. Et Emmanuel a beaucoup étudié : IUT d’agronomie, stage à l’INRA, biologie marine à Édimbourg, puis à Monaco, et thèse de génétique de l’évolution en Nouvelle-Zélande. C’est là, en commençant à fréquenter les coffee-shops pour rédiger ses travaux, qu’il découvre le café de spécialité.

Mais le déclic qui l’a fait basculer du monde des amateurs à celui des pros eut lieu en Californie. Dans une librairie, il tomba sur une sorte d’ « Ouvrir un coffee-shop pour les nuls ». Au fil de la lecture, il devenait évident que cet univers était celui dans lequel il voulait travailler. Et, l’air de rien, entre la Nouvelle-Zélande, le Canada et la Californie, cela faisait presque dix ans qu’il était à l’étranger et il lui tardait de rentrer pour démarrer une nouvelle carrière. À ce moment-là, en 2011/2012, la scène du café avait commencé à s’installer en France et c’est à la Caféothèque qu’il entreprit une formation et qu’il fit ses premières armes de barista. Il participa ensuite à l’ouverture de trois cafés, dont le fameux Fragments.

Il y a quelque chose qui relève de l’horreur du vide, du besoin d’activité ou des deux à la fois chez lui. Quelque chose qui lui donna envie de créer le RBF, entre deux missions. Grande idée que celle de défendre le (s intérêts du) métier de barista, de faire se rencontrer les spécialistes du café, d’une part, et professionnels et amateurs de café d’autre part, d’organiser une communauté…

Dans le joli cadre du Strada café de la rue Monge

Dans le joli cadre du Strada café de la rue Monge

Expliquer au public qu’ils ne sont pas uniquement serveurs, ni barmen, et créer un cadre administratif pour cela. Convaincre aussi qu’il ne s’agit pas que d’un job étudiant non plus. Barista est un métier à part entière qui demande des compétences, de l’ambition, de l’expérience. Le RBF communique sur le métier et sur le café en passant par l’organisation, par exemple, de mini-compétitions qui permettent de préparer les participants aux championnats officiels tout en évoquant l’esprit pionnier des Frog Fights. Le Réseau se veut aussi source d’informations pour les baristi qui peuvent se renseigner sur les différents aspects du métier histoire d’être complet : le barista est un technicien, un orateur, un scientifique… « Ah oui, ça te parle l’aspect scientifique ! », lui dis-je.

« Oui, le café c’est de la botanique, de la physique, de la chimie, de l’ingénierie, avec les machines espresso… ». Son solide bagage scientifique est un plus qu’il tient à cultiver : cela l’a amené à répondre positivement à l’invitation de se rendre en Éthiopie pour faire quelques expériences lors des récoltes, sur les traitements de lavages, la maîtrise de la fermentation… Travailler dans ce pays pour un passionné de café, « c’est une expérience incroyable ! » me dit-il. D’ailleurs, le RBF, avec la SCAE France et Les Torréfacteurs, organise la journée scientifique du café, le 9 novembre prochain. Des spécialistes de différents domaines de recherches (Chimistes, botanistes, sociologues…) seront présents.

Emmanuel Buschiazzo

Emmanuel Buschiazzo

Pour finir, revenons à un niveau plus personnel : « quel est ton café, ton terroir préféré ?

– Ce n’est pas très original mais j’ai un faible pour les Éthiopiens, surtout de la Région Guji que j’ai pu visiter l’hiver dernier (Cf. plus haut).

– Il y a une bonne raison alors…

– Oui, quand on a la chance de connaitre le pays, voire la région d’origine d’un café que l’on boit, on ne peut s’empêcher de penser aux lieux, aux visages, aux odeurs, c’est magique…

– Quelle ta méthode de préparation préférée à mettre en œuvre sinon ?

– Chez moi, je ne jure souvent que par ma Kalita.  Le rendu est propre, mais toujours avec beaucoup de corps et de complexité aromatique.

– Et pour boire ?

– Dehors, je ne commande pratiquement que des espressi, ça doit être mon côté italien. Un bon espresso, ça ravit. Un très bon espresso, c’est une quantité incroyable de paramètres maîtrisés, ça impose le respect.

Actuellement, Emmanuel met en œuvre un projet : pour aller à la rencontre des amateurs de l’Infusion et de ceux qui pourraient l’être, il propose, associé à Sandra Bouckenhooghe, un pop’up café au musée Cognacq-Jay dans le cadre de l’exposition Thé, Café ou Chocolat ? L’essor des boissons exotiques au XVIIIe siècle, tous les weekends pendant la durée de l’exposition, jusqu’au 27 septembre. Emmanuel et Sandra ont réalisé un coffee bar ambulant sur mesure qui leur permet de proposer du café de spécialité ici comme dans tous lieux publics, y compris les plus insolites. On espère que la formule pourra être étendue à d’autres musées, d’autres endroits, car Emmanuel voudrait que tout le monde puisse apprécier un café de qualité.

« Le bon café pour tous », tel est son motto.

 
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Publié par le 22 juillet 2015 dans Les gens

 

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